Une question revient souvent lors de premiers contacts entre un inventeur et un cabinet de propriété industrielle : « Devons-nous signer un contrat de confidentialité ? »
Dans la grande majorité des cas, lorsque l’on divulgue son invention à quelqu’un avant le dépôt et même la publication de son brevet, il est fortement conseillé de signer un contrat de confidentialité. Un excès de confiance peut emmener à la perte de titres de propriété ou de possibles titres de propriété industrielle dans le futur. Dès lors, l’inventeur, ou la société peut voir tous ses investissements en R&D réduit à néant.
Dans le cas d’un inventeur, ou une entreprise face à un cabinet de propriété industrielle, la question de la signature d’un contrat de confidentialité pourrait donc être légitime de la part de l’inventeur ou de la société. L’invention est un projet de longue haleine qui a généralement pris beaucoup de temps, parfois d’argent. Sa divulgation est toujours un moment important dans la vie de l’invention, alors quand signer un contrat de confidentialité ? YesMyPatent vous répond.
Il est inutile de signer un contrat de confidentialité avec son conseil en propriété industrielle
Bien que dans la majorité des cas de négociations ou de discussion autour d’une innovation le contrat de confidentialité devrait être un automatisme, il existe des cas dans lesquels ils sont inutiles.
L’article L. 422-11 du Code de propriété intellectuelle dispose qu’: « en toute matière et pour tous les services (…), le Conseil en Propriété Industrielle observe le secret professionnel. Ce secret s’étend aux consultations adressées ou destinées à son client, aux correspondances professionnelles échangées avec son client, un confrère ou un avocat, aux notes d’entretien et, plus généralement, à toutes les pièces du dossier ».
Cela signifie qu’un Conseil en Propriété Industrielle est soumis au secret professionnel absolu dans tous ses échanges, qu’ils soient téléphoniques, emails, ou courriers.
Cet article du Code de la propriété intellectuelle a été introduit pour permettre « aux conseils en propriété industrielle, [pour] être dispensé de témoigner, d’invoquer le secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 109 du code de procédure pénale et 206 du nouveau code de procédure civile. Elle les mettra notamment à l’abri d’une obligation de divulguer une correspondance échangée avec un client dans le cadre d’une procédure civile engagée à l’étranger. » (Exposé des motifs du projet de loi du 11 février 2004)
Il est dont inutile de signer un contrat de confidentialité, ou NDA, avec un cabinet ou conseil en Propriété Industrielle, qui au même titre que les avocats, est soumis au secret professionnel.
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Les échanges entre CPI et Avocats français sont également soumis au secret
L’article L.422-11 du Code de la propriété intellectuelle protège les échanges entre clients et Conseils en propriété industrielle, mais également entre CPI et avocats.
En effet, les échanges entre Conseils en Propriété Industrielle ou entre Avocats et Conseils en Propriété Industrielle français, sont également soumis à une stricte confidentialité.
Affaire Laboratoire CL Tech contre Pierre Fabre
Le 24 novembre 2015, la Cour d’appel de Paris a rendu son verdict sur le sujet de la confidentialité autour des correspondances échangées entre un avocat et un Conseil en Propriété Industrielle.
Le Laboratoire CL Tech attaquait Pierre Fabre pour une contrefaçon de son brevet. La preuve du laboratoire étant une correspondance adressée par le CPI de Pierre Fabre à son avocat. Ce à quoi Pierre Fabre a opposé l’article L.422-11 du Code de la Propriété Industrielle.
La Cour d’Appel de Paris a accepté les arguments de Pierre Fabre, en retenant que « prétendre que dès lors que l’avocat n’est pas de son côté tenu au secret édicté par [l’article L422-11 du CPI], il lui serait loisible de divulguer une correspondance qui lui a été adressée sous couvert de confidentialité, revient à vider de sa finalité ce secret destiné à protéger les intérêts du client concerné ».
Il est conseillé lors d’échanges entre conseils français et étrangers d’utiliser la mention « Confidentiel » dans les échanges importants. Les correspondances ne pourront donc pas être produites en justice en cas de litige ni engager les parties en cause.
La divulgation de mon invention
Dans tous les cas où une invention doit être divulguée, que cela soit auprès d’un fournisseur de matière première, un bureau de R&D ou un voisin spécialisé en communication, il est primordial de signer un contrat de confidentialité avec les mentions de propriété industrielle adéquates.
Un simple exemple de contrat trouvé sur internet ne suffit pas ! Il ne protègera pas les aspects de propriété industrielle de votre invention. Et en matière de brevets, la divulgation d’une invention, en empêchera la protection par brevet.
Affaire AHG, AHG Rivets et F2C2 System contre Brötje Automation GmbH
La Cour d’Appel de Paris a jugé le 12 décembre 2012 l’action en contrefaçon d’AHG, AHG Rivets et F2C2 System (« AHG » pour la suite), détenteurs d’un brevet Européen et d’un brevet français, contre Brötje Automation GmbH (« Brötje » pour la suite) , lié par une licence d’exploitation.
AHG reprochent à Brötje d’avoir rompu brutalement leurs accords commerciaux, et décident donc d’assigner Brötje en contrefaçon pour leur interdire d’exploiter leurs brevets.
Or, Brötje répond à cette attaque en affirmant que l’invention leur avait été divulguée par AHG sous la forme de prototype avant le dépôt des brevets, et que les brevets doivent donc être annulés pour défaut de nouveauté.
La brevetabilité d’une invention repose sur les caractéristiques de nouveauté, d’activité inventive et d’application industrielle.
La cour d’Appel avait considéré que « si l’article L 611-13 du code de la propriété intellectuelle dispose qu’une divulgation de l’invention n’est pas prise en considération notamment si elle résulte directement ou indirectement d’un abus évident à l’égard de l’inventeur ou de son prédécesseur en droit, tel que notamment la violation d’une obligation de confidentialité des informations transmises sur les caractéristiques de l’invention, il appartient au breveté de rapporter la preuve de l’existence d’une telle obligation de confidentialité ; »
Cependant AHG, n’ont pas pu apporter la « preuve d’entretiens ou de contacts verbaux » sur la confidentialité de leurs échanges. Une clause de confidentialité avait effectivement été signée, mais dans le cadre d’une invention différente !
Dès lors, les revendications du brevet français ont été considérées comme nulles par le Tribunal, par manque de nouveauté et rejetées.
La précipitation, le besoin de finalisation rapide d’un acte commercial, sont souvent contre-productifs en matière juridique et peuvent entraîner la perte de titres de propriété industrielle durement acquis. Cette affaire démontre à quel point la confidentialité et la signature de contrats spécifiques sont importants en matière de propriété industrielle pour toutes les sociétés innovantes.
Si vous devez divulguer tout ou partie de votre invention à un tiers, ayez le bon réflexe et contactez votre Conseil en Propriété Industrielle qui pourra vous accompagner dans toutes vos démarches.
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