Vous avez peut-être vu passer une vidéo ou un post sur les réseaux sociaux relayant l’information selon laquelle le coronavirus aurait été « inventé » en 2003, et aurait fait l’objet d’un brevet (EP1694829) de l’Institut Pasteur. Nous laissons nos confrères de l’Institut Pasteur vous répondre sur le versant scientifique, via leur communiqué que vous pourrez retrouver ici, et nous concentrerons donc seulement sur le brevet, pour faire la lumière sur cette histoire, pour laquelle nous avons déjà eu des questions aujourd’hui en tant que spécialistes des brevets en biotechologies.
Analyser un virus, n’est pas inventer un virus
Le brevet de l’Institut Pasteur est bien un brevet européen en vigueur en France, mais ses inventeurs, c’est-à-dire les personnes ayant contribué de manière significative à la conception de l’invention, n’ont pas « inventé » un virus, ils ont en réalité analysé ce virus et identifié un polypeptide (un petit bout de protéine du virus). Ce polypeptide est suffisamment significatif de ce virus pour pouvoir être utilisé pour fabriquer un test de diagnostic et une stratégie vaccinale contre ledit virus. Pour rappel cette souche de virus est certes de la famille des Coronavirus, mais il ne s’agit en aucun cas de la souche particulière COVID-19 qui nous touche actuellement.
Il s’agit de la souche de coronavirus responsable du SARS de 2003, un des très nombreux coronavirus qui existe. De plus, ce brevet, comme tous les brevets, comprend une partie présentant des résultats permettant de caractériser l’efficacité de l’invention. Ici, la stratégie vaccinale est testée chez la souris en caractérisant la présence d’anticorps.
Le brevet pour assurer que la stratégie vaccinale soit reproductible
Enfin, le dépôt de matière biologique est une particularité de ce type de brevet en biotechnologies portant sur des bactéries ou des virus. Le déposant a pour obligation de déposer la matière biologique (un échantillon du virus) auprès d’un organisme réglementé (comme l’Institut Pasteur) qui va stocker cette matière et délivrer un numéro de dépôt à indiquer dans le brevet, afin que l’invention objet du brevet – ici la stratégie vaccinale contre le virus – soit reproductible par d’autres laboratoires notamment une fois le brevet tombé dans le domaine public, et même avant puisqu’il est autorisé d’utiliser une invention brevetée à des fins de recherche.
Un brevet est un document scientifique et juridique à faire analyser par des professionnels
Cependant, bien que les informations de ces vidéos soient abusives et caricaturales, le réflexe de fouiller dans la littérature brevet pour obtenir de l’information scientifique, lui, est intéressant. En effet, cette littérature regorge d’informations scientifiques de tout domaine technique et représente ainsi une véritable source bibliographique pour les chercheurs ou simplement les curieux, pouvant permettre par exemple de trouver de nouvelles pistes thérapeutiques et vaccinales. Mais avant de diffuser des analyses de ces brevets, qui sont des documents scientifiques et juridiques complexes, il peut être utile de se rapprocher d’un conseil en propriété industrielle agrée pour en valider la pertinence…