La protection des MedTech : Déposer le brevet d’un dispositif médical

Une refonte de la réglementation européenne des dispositifs médicaux est entrée en vigueur le 26 mai 2021 (règlement européen 2017/745). Nous profitons de cette occasion pour vous apporter nos conseils pour comprendre les enjeux et les particularités de la protection par brevets de ces technologies médicales.

L’industrie des dispositifs médicaux (autrement dénommée MedTech) est en croissance constante depuis les 10 dernières années. Ceci se traduit par une augmentation importante des dépôts de brevets, en particulier auprès de l’Office Européen des Brevets où les technologies médicales se hissent en première place des dépôts de demandes de brevets en 2020.

Les Dispositifs Médicaux : qu’est-ce que c’est ?

Un dispositif médical est « un instrument, un appareil, un équipement ou bien encore un logiciel destiné par son fabricant à être utilisé chez l’homme à des fins de diagnostic clinique par le médecin, de prévention, de contrôle, de traitement, ou encore d’atténuation d’une maladie ou d’une blessure » (Ministère de la Solidarité et de la Santé).

L’innovation en matière de santé ne se limite donc pas à la mise au point de nouveaux médicaments, mais peut prendre la forme de petits dispositifs à avaler, de robots médicaux ou d’articulations de remplacement telles que des valves cardiaques mécaniques par exemple.

Ces dispositifs médicaux sont souvent, de par leur conception, à la croisée de plusieurs domaines techniques tels que la biologie, la mécanique, l’informatique et l’électronique, et nécessitent ainsi des compétences techniques complémentaires. 

Chez YesMyPatent et son réseau de consultants ayant au minimum 10 ans d’expérience dans au moins un de ces domaines techniques, vous avez l’assurance d’être accompagné par une équipe de spécialistes d’horizons techniques différents, collaborant entre eux pour offrir la meilleure protection possible à votre dispositif médical.

La Réglementation – Règlement 2017/745

👉🏼 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32017R0745

« Ce règlement signé en avril 2017 définit un cadre légal sur les dispositifs médicaux et précise ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas concernant l’utilisation de ces derniers. La fabrication et la commercialisation de ces dispositifs y sont également abordés, renforçant les mesures de sécurité de ces derniers. Le champ d’application de ce règlement est étendu également aux logiciels faisant partie ou étant à part entière des dispositifs médicaux.

En bref, ce règlement permet une adaptation des règles de classification, clarifie et détaille les obligations et les responsabilités des opérateurs économiques. Aussi, les organismes notifiés seront placés sous le contrôle européen et devront répondre à un cahier des charges renforcé en matière de compétence et de contrôle.

Le dispositif de vigilance sera également amélioré avec la mise en place d’un système de surveillance post-commercialisation. Enfin, la transparence et la traçabilité seront améliorées avec notamment la création d’une base de données européenne des dispositifs médicaux qui sera accessible au public et permettra une meilleure connaissance du marché, des incidents et des investigations cliniques. »  

La protection par le brevet d’un dispositif médical : définition

La protection par le droit de brevet confère au titulaire un monopole d’exploitation pour une durée de 20 ans à compter de la date de dépôt de la demande de brevet, lui permettant d’interdire l’exploitation de son invention à un tiers sans son autorisation sur le territoire du brevet.

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L’invention couverte doit être une solution technique apportée à un problème technique, qui doit répondre notamment aux deux critères majeurs de brevetabilité, à savoir la nouveauté et l’activité inventive.

Le critère de nouveauté nécessite que l’invention n’ait pas été rendue accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet, soit par une description écrite, orale, un usage ou tout autre moyen (y compris dans le cadre d’un congrès regroupant des professionnels du métiers). 

L’activité inventive est un critère qui nécessite que l’invention ne soit pas déductible de manière évidente des éléments connus avant la date de dépôt de la demande de brevet, seuls ou combinés entre eux.

En outre, concernant les dispositifs et méthodes dans l’exercice médical, un critère complémentaire important est la non-exclusion de la brevetabilité. Cette exclusion de la brevetabilité porte spécifiquement sur les méthodes de traitement chirurgical ou thérapeutique du corps humain ou animal et les méthodes de diagnostic appliquées au corps humain ou animal, cette disposition ne s’appliquant pas aux produits, notamment aux substances ou compositions, pour la mise en œuvre d’une de ces méthodes. Par conséquent, les instruments et appareillages chirurgicaux, thérapeutiques ou de diagnostic devant être utilisés dans ces méthodes peuvent être brevetés.

Pour plus d’informations sur les critères de brevetabilité, nous vous conseillons de lire l’article qui suit sur le site YesMyPatent : « Déposer un brevet : Arrivée du critère d’activité inventive ».

Exemple d’un dispositif médical : les lunettes connectées YesMyGlasses

Comme indiqué brièvement ci-dessus, les dispositifs médicaux renferment la plupart du temps une combinaison de technologies diverses, provenant de domaines différents. Des compétences techniques complémentaires sont ainsi nécessaires pour protéger au mieux votre dispositif par la voie du brevet. 

Afin de vous définir au mieux les tenants et aboutissants de la protection par brevet d’un dispositif médical, nous allons passer par une invention fictive : Une paire de lunettes qui permet par l’intermédiaire d’un processeur contenant un procédé informatique d’obtenir des verres correcteurs auto-évolutifs qui s’adaptent à la vue de chaque patient en continu, créant ainsi une paire de lunette avec une correction adéquate constante, quelle que soit la pathologie du patient (presbytie, l’astigmatisme, la myopie ou l’hypermétropie).

Dans ce cas de figure, différents spécialistes sont susceptibles d’intervenir pour apporter leur expertise dans la rédaction des différentes parties de la demande de brevet :

  • La protection des aspects thérapeutiques permettant de corriger la vue du patient en s’adaptant à sa déficience visuelle relève d’un spécialiste du médical et des sciences de la vie ;
  • La conception technique du dispositif, c’est-à-dire les branches, le cadre des lunettes, la déformation des verres, nécessitent un spécialiste en mécanique ;
  • La partie logicielle de l’invention, comprenant la méthode mise en œuvre par le processeur des lunettes, nécessite un spécialiste informatique ;
  • Le processeur et son implémentation dans les lunettes, ainsi que le lien avec les verres correcteurs, nécessitent de faire appel à un électronicien.

La protection par le droit de brevet du dispositif

Les revendications sont la partie d’un brevet qui définit la protection apportée par celui-ci. Elles doivent porter sur les aspects techniques de l’invention.

Dans le cas des lunettes prises en exemple ici, les différentes caractéristiques qui paraissent protégeables comprennent la méthode (mise en œuvre par un processeur embarqué) permettant de déterminer la vue du patient et d’ajuster la correction, le dispositif de lunettes pour la correction de la vue du patient, et l’utilisation de ce dispositif dans le but de corriger la vue du patient.

Exemple de rédaction de revendications indépendantes (indépendamment d’arts antérieurs existants)

1 – Méthode, mise en œuvre par un processeur embarqué au sein d’au moins une branche d’un dispositif de lunette, de détermination de la vue d’un patient et de la correction nécessaire de celui-ci, le dispositif de lunette comprenant deux verres correcteurs reliés au processeur, chaque verre comportant un élément apte à scanner la rétine d’un patient en continu, le procédé comprenant des étapes de :

– Réception de données de scan rétinien permettant de déterminer l’amétropie d’un patient ;

– Détermination, en fonction des données de scan rétinien reçues, de la correction nécessaire pour ledit patient.

2 – Dispositif de lunette pour correction d’amétropies comprenant :

– Deux branches, au moins une desdites branches comprenant un processeur configuré pour mettre en œuvre les étapes de la méthode selon la revendication 1 ;

– Deux verres correcteurs reliés au processeur, comprenant chacun un élément apte à scanner la rétine d’un patient en continu, et configurés chacun de sorte que leur courbure est modifiable en fonction des données collectées par ledit processeur.

3 – Utilisation du dispositif selon la revendication 2 pour maintenir constamment la vue d’un patient à 10/10.

La protection complémentaire au brevet de votre dispositif médical

Protection par le droit des dessins et modèles

Peut être protégée à titre de dessin ou modèle l’apparence d’un produit ou de ses parties, caractérisée en particulier par ses lignes, ses contours, ses couleurs, sa forme, sa texture ou ses matériaux. Ces caractéristiques peuvent être celles du produit lui-même ou de son ornementation.

La protection que confère un dessin et modèle est de 25 ans, par tranche de 5 ans.

Ce type de protection permet de protéger le visuel de votre dispositif médical. Dans le cadre de notre exemple, la protection par le droit des dessins et modèles permet de protéger le design des lunettes, et de se prémunir de potentiels contrefacteurs qui reproduiraient l’apparence de la paire de lunettes.

Protection par le droit des Marques 

Une marque est constituée par tous les signes, notamment les mots (dont les noms de personnes), les dessins, les lettres, les chiffres, les couleurs, la forme d’un produit.

La durée de protection par le droit des marques est de 10 ans à compter du dépôt et est renouvelable indéfiniment par le biais de frais de renouvellement. 

Ce type de protection permet de protéger la dénomination commerciale de votre dispositif médical, son logo, ou un éventuel nom de domaine associé. Dans le cadre de notre paire de lunettes, la dénomination YesMyGlasses pourrait être protégée à titre de marque, afin qu’aucun tiers ne puisse utiliser le nom pour une utilisation similaire ou proche.

Protection par le droit d’auteur

Le code source d’un logiciel est protégé par le droit d’auteur, dont les droits patrimoniaux sont transmissibles et valables pendant une durée de 70 ans à compter du décès de l’auteur.

La protection automatique acquise dès sa création peut être complétée par un dépôt auprès de l’Agence de Protection des Programmes, permettant de dater efficacement la création du code. Dans le cas de notre exemple, le code source introduit dans le processeur est protégé par le droit d’auteur.

RGPD

Le logiciel du dispositif médical permet la collecte de données de santé dans des bases de données. Ces bases de données sont régies par le règlement général sur la protection des données (RGPD) dans le but de responsabiliser l’entité qui collecte et traite les données vis-à-vis des gens à qui ces données sont collectées.

Les données de santé sont dites « sensibles » au sens de l’article 9 du RGPD, au même titre que les opinions religieuse, politique, ou encore l’orientation sexuelle. Le nouveau règlement 2017/745, abordé ci-dessus, établit un cadre légal qui impose de nouvelles règles de classification spécifiques aux logiciels.

Toutes les applications des logiciels destinés à des usages relatifs aux dispositifs médicaux dans le domaine de la santé n’ont pas vocation à être qualifiées de dispositif médical en tant que tel. Il appartient donc au fabricant de s’interroger en amont sur la nature de son produit sans perdre de vue que la réglementation a considérablement augmenté le niveau de contrôle des logiciels relatifs aux dispositifs médicaux à la suite de l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles de classification.

Autorisation de mise sur le marché (AMM) et Certificat complémentaire de protection (CCP)

Au contraire des médicaments, les dispositifs médicaux ne sont pas soumis à la procédure d’autorisation de mise sur le marché. Pour rappel, un dossier de demande d’AMM reprend toutes les étapes de fabrication du médicament, son efficacité, et les effets secondaires observés au cours des différentes phases cliniques.

Le CCP est un titre à part entière qui permet d’allonger de 5 ans maximum la durée d’un brevet. Seule une substance ayant reçu une AMM peut faire l’objet d’un CCP, conformément à l’article 2 du règlement 469/2009 du 6 mai 2009.

Ainsi, un dispositif médical ne répondant pas à la définition d’un médicament, il ne peut pas prétendre à l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché.

L’alternative proposée pour ces technologies médicales afin de pouvoir les mettre dans le commerce est la certification de conformité CE.

Le marquage CE permet d’attester de la conformité du dispositif médical aux réglementations et directives en vigueur au sein de l’Union Européenne. En aucun cas, il ne s’agit d’une indication de l’origine géographique du dispositif comme on tend souvent à le penser.

C’est la dernière étape à réaliser une fois le produit prêt au lancement, pour pouvoir lancer les processus de production avant la mise en vente dudit produit.

Une certification de conformité CE, pour un dispositif médical incorporant une substance active sur le plan pharmacologique, ne peut être assimilée à une autorisation de mise sur le marché, quand bien même ladite substance aurait fait l’objet d’une évaluation similaire.

Le marquage CE n’étant pas une AMM, il n’est donc pas possible d’obtenir un CCP sur la base d’un dispositif médical ayant obtenu cette certification de conformité.

Ecrit par YesMyPatent

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